Le paysage, les jardiniers et la photographe
Invitée à m’immerger dans la vallée du Lot en ce début de printemps parfois capricieux, j’ai découvert, de surprenants jardins paysages. J’ai saisi l’habile et parfois ludique intervention de jardiniers amateurs et passionnés. J’ai cherché à réaliser des images sensuelles et décalées où l’on effleure la main de l’homme qui façonne et sculpte des bouts de paysages consentants. Les portraits que je souhaitais réaliser ne se sont pas imposés d’eux même. Au fond je m’en doutais. A Blois, à Ramallah, à Saumur, dans la province du Cap Oriental j’avais, avec des gens évidemment très différents, déjà ressenti ce léger flottement propre aux nouvelles rencontres.
Le temps m’était compté mais je savais que je trouverai, sans astuce ni artifice, la bonne distance et la juste complicité qui me font croire à la force du portrait. Au milieu de cette nature tantôt exubérante tantôt domestiquée, je désirais alors révéler des facettes d’humanités sans fard ni quête présomptueuse de vérité. J’ai rencontré beaucoup de monde et participé à des discussions riches. J’ai découvert une forêt de conte de fées. J’ai grimpé des collines, croisé des elfes dans des sous-bois verts étincelants. Je les ai capturé avec mon appareil photo puis relâché sur les bâches de la ville. J’ai rencontré une institutrice idéale, parlé plantes anciennes mais aussi causse et oppidum. J’ai adopté un râteau-castine qui, comme dans les inventaires à la Prévert, s’est malicieusement immiscé dans mes photographies.
Comme pour souligner le sérieux de leur démarche, je leur ai demandé de poser concentré. Poser sans sourire n’a pas toujours été évident, et imposer la neutralité des expressions a souvent paru incongru. J’ai alors imaginé des mises en scène comme des clins d’œil à un théâtre en liberté. Au fond et comme toujours j’ai dû m’adapter aux lieux, à la lumière et aux gens. J’ai tenté de faire ressortir autant que faire ressentir toute la complexité et souvent la beauté d’une rencontre... J’ai aimé faire ces photos.
The landscape, the gardeners and the photographer
Invited to immerse myself in the Lot valley at this sometimes capricious beginning of spring, I discovered surprising landscape gardens. I have grasped the skillful and sometimes playful intervention of amateur and passionate gardeners. I sought to produce sensual and offbeat images in which one touches the hand of the man who shapes and sculpts consenting scraps of landscapes. The portraits I wanted to take did not impose themselves on themselves. Deep down I suspected it. In Blois, Ramallah, Saumur, in the province of the Eastern Cape I had, with obviously very different people, already felt this slight hesitation inherent in new encounters.
Time was running out but I knew that I would find, without trick or artifice, the right distance and the right complicity that make me believe in the strength of the portrait. In the midst of this sometimes exuberant, sometimes domesticated nature, I wanted to reveal facets of humanities without make-up or presumptuous quest for truth. I met a lot of people and participated in rich discussions. I discovered a fairytale forest. I climbed hills, crossed elves in sparkling green undergrowth. I captured them with my camera and then released them onto the city tarps. I met an ideal teacher, talked about old plants, but also causse and oppidum. I adopted a limestone rake which, as in the Prévert-style inventories, has mischievously interfered with my photographs.
As if to emphasize the seriousness of their approach, I asked them to pose concentrated. Posing without smiling has not always been easy, and imposing neutral expressions has often seemed incongruous. I then imagined staging as a nod to a theater in freedom. Basically and as always, I had to adapt to the places, the light and the people. I tried to bring out all the complexity and often the beauty of a meeting ... I enjoyed taking these photos.